Le théâtre de l'Unité est installé à Audincourt depuis l'an 2000. Mais la carrière de cette compagnie de renommée mondiale dans l'univers du théâtre a commencé à la fin des années 60.
La réputation d'Hervée de Lafond et de Jacques Livchine n'est plus à faire : dans le domaine du spectacle de rue, on peut dire qu'ils ont tout inventé. Ils ont mis le bazar partout, depuis la banlieue parisienne, jusqu'à l'Australie en passant par Avignon, Pékin, l'URSS et les USA...et le Pays de Montbéliard.
Jacques Livchine, quand il écrit, adopte toujours un style vivant et décontracté. Dans Les Mille et une plaisanteries du théâtre de l'Unité, il fait un inventaire. Pas à la Prévert, pas une liste de course. Non, juste la narration des succès et des échecs d'un théâtre qui a toujours cherché et qui cherche encore.
Comment toucher le plus grand nombre, comment faire venir les gens au théâtre et comment faire venir le théâtre aux gens ? Comment réinventer les plus grands textes, Molière, Shakespeare... ? Comment faire du théâtre même avec de l'opérette, même avec de la poésie ? Comment rendre Rimbaud vivant, lui qui est mort à 37 ans ?
C'est expérimental et des fois, ça marche, des fois, ça ne marche pas. Mais c'est une aventure, ce sont des souvenirs, des rencontres, de l'humain. De la nourriture, de la musique, de la folie.
Le théâtre, c'est l'art de l'instant, de l'éphémère. Quand on lit Livchine, pourtant, on découvre un théâtre qui reste dans la tête des gens. Ici, dans le Pays de Montbéliard, tous ceux qui ont eu la chance de les vivre, parlent encore du Réveillon des Boulons. J'ai eu l'occasion de parler avec des spectateurs qui avaient encore les larmes aux yeux en évoquant Terezin et c'était en 1995.
Le théâtre est pour moi le plus grand catalyseur d'émotions. On parle de catharsis, et ça, depuis l'Antiquité. C'est une émotion pure, indescriptible et souvent incompréhensible, qui vient toucher l'intime et l'inconscient comme rien d'autre. C'est ce qui permet d'exprimer les passions, de faire le tri entre le bon et le mauvais. C'est tellement puissant que j'ai parfois du mal à aller au théâtre. Mais c'est précisément en cela que l'acte théâtral est indispensable, qu'il est politique et qu'il fait partie de la cité. Qu'il doit faire partie de la cité.
Le théâtre de l'Unité a essaimé, à travers des années de "ruches", à travers des dizaines de résidences d'artistes. Ils ont instillé la folie et la passion, mais aussi la conscience politique, l'importance du fou pour une démocratie saine.
L'année dernière, on a crié au scandale quand Hervée de Lafond a un peu malmené un 1er ministre 40 ans plus jeune qu'elle. Elle a eu raison de nous rappeler que c'est le rôle de l'artiste dans la société. C'est le rôle de Molière à la Cour de Louis XIV de critiquer les mœurs du temps. C'était le rôle des farces du Moyen-Âge de remettre en cause l'ordre établi, c'était le rôle des pièces antiques d'interroger les apparences, de remettre en cause l'organisation du pouvoir.
Nous n'avons aucun intérêt de l'oublier. Merci au théâtre de l'Unité : merci pour l'humour, pour la créativité, pour la réflexion, pour le dérangement, pour la provocation, pour les mille et une plaisanteries.
Mais c'est Jacques Livchine qui en parle le mieux, alors achetez son livre ! (Au théâtre de l'Unité (parc de la Filature à Audincourt, ouvert de 10h à 18h du lundi au vendredi) ou aux Papiers Bavards)



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