19 août 2010

Fiction de l'été - Episode 9 - Fin

Ce qu’il fallait mettre au clair, tout d’abord, c’était la présence du président à l’Elysée, en pleines vacances.

Son épouse balbutia vaguement les mots «travail, dossiers des retraites, rentrée chaude»...

Le ministre évoqua effectivement une réunion de travail qui devait avoir lieu à Brégançon, mais qu’on avait déplacée, finalement...Pourquoi ? Paris, c’est plus pratique, pour les médias et la justice...

Qui avait décidé que la réunion serait à Paris ? C’était étonnant, mais il semblait que c’était le ministre, pourtant fort en disgrâce.

Deuxième point à éclaircir : les alibis de chacun. Certes, chacun avait été vu dans des lieux publics jusqu’à 22 H 30. Mais si on en croyait le légiste, le crime avait eu lieu un peu après.

Après, le ministre et sa femme, qui mangeaient au Crillon, avaient marché, anonymes, au milieu de la foule de touristes du mois d’août, sur la plus belle avenue du monde.

Après, la première dame de France avait pris un livre et s’était retirée dans un des petits salons de l’Elysée. Toute seule avec le dernier Beigbeder...

Après, le comptable avait pris sa voiture pour aller en Normandie. Il avait roulé de nuit, et n’avait pas pris l’autoroute.

En y regardant de plus près, personne n’avait un alibi sérieux entre 22 h 30 et minuit.

Valandier, au hasard, releva les pointures des chaussures de tout le monde. Le labo avait bel et bien compté 7 traces de pas distinctes. Les gravillons de la cour de l’Elysée, c’était une vraie plaie pour les femmes de ménage.

Faisons le compte : il y avait bien sûr les pas du président, les pas de sa femme, qui avait accouru en entendant du grabuge, il y avait aussi les deux gardiens de la paix, arrivant un peu tard, pour découvrir le président lardé de coups de couteau. Il restait donc 3 empreintes non identifiées.

Bingo ! Les relevés collaient : les trois empreintes étaient celles du comptable, du ministre et de sa femme. Pas de doute.

Valandier et le commissaire convoquèrent tout ce petit monde.

Il était clair que le président avait été tué méthodiquement par trois symboles : les magouilles politiques, les magouilles financières et les magouilles pipolitiques...Car la première dame de France fut vite mise en cause par les trois autres.

Valandier dut faire une conférence de presse pour expliquer tout cela :

« Les prévenus ont avoué. Ils ont même dénoncé la femme du président qui a elle aussi reconnu les faits.

Voilà comment s’est déroulé la scène : à 22 h 45, les gardiens de la paix en place sont remplacés par l’équipe de nuit. Il y a une minute de flottement. A ce moment-là, Madame s’est débrouillée pour faire rentrer dans le palais, le comptable de Mme Bassecourt et le couple ministériel.

Ils ont rencontré le président dans le hall et par surprise et alors que l’homme ne se méfiait pas, le comptable a asséné un premier coup de couteau. C’était un peu comme si le monde de la finance assassinait un homme qui avait trop flirté avec lui, sans jamais parvenir à intégrer parfaitement ce monde.

Ensuite, le poing serré sur le même couteau, Monsieur le ministre des finances et sa femme ont eux aussi donné un coup de couteau. C’était la reproduction concrète de tous les couteaux plantés dans le dos de ses adversaires politiques, tout au long des dernières décennies. Ces coups de couteaux lui avaient permis d’obtenir la meilleure place. Un coup de couteau le faisait tomber.

Enfin, le dernier coup de couteau, celui de son actrice de femme, avait été donné aussi pour souligner un des péchés de l’homme d’Etat : il aimait les flashs et les stars. On se souvenait de lui serrant la main d’un acteur hollywoodien, on se rappelait de ses apparitions contrôlées ou non dans Voilà ou dans WSD. Cependant, il ne faisait pas partie de ce monde. Elle l’avait prévenu, pourtant : il ne fallait pas qu’il se représente en 2012. D’ailleurs, leur contrat de mariage ne prévoyait pas d’aller aussi loin.»

Il avait été tué par là où il avait péché.

Au procès, les coupables plaidèrent qu’en leur âme et conscience, en détruisant ce tordu, ils étaient bien convaincus d’avoir servi la France.

On était dans l’embarras, alors on les condamna, puis on les amnistia. Et le pays reconnaissant les élut immédiatement chefs du gouvernement.


CC
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