9 juin 2011

Enquête sur la désindustrialisation

Hier soir, j'étais à la présentation de la mission sur la désindustrialisation, avec Martial Bourquin, le sénateur qui a présidé la commission qui s'est chargé de ce rapport. J'en ai déjà parlé il y a quelques temps. J'ai fait un Live Tweet (le mot tweet est entré dans le dictionnaire hier !)...Voilà un petit résumé...

L'introduction par Martial Bourquin présente la commission : même si le sénateur socialiste a été l'initiateur, le groupe de travail est majoritairement à droite. Les idées reçues sur le sujet étaient, dès le début, celle du productivisme. L'idée qu'il faut réduire les coûts du travail pour gagner en productivité. C'est par un voyage en Allemagne que l'on va voir que les choses ne sont pas si simples. C'est un voyage dans les landers allemands qui va être éclairant. Ce qu'il faut souligner, aussi, c'est que parler de désindustrialisation, c'est désespérant. Il ne faudrait pas oublier de vouloir la réindustrialisation et c'est pour cela que ce rapport est bon : il propose des choses concrètes.

La soirée s'est poursuivie avec la projection d'un reportage de la chaîne Public Sénat. C'est intéressant, si vous avez quelques minutes...




Il faut revenir sur quelques chiffres et sur quelques idées phares : 30 % du PIB allemand vient de l'industrie. Seulement 16 % en France. Pourtant, le coût du travail est identique. Les Allemands ont misé sur la qualité. Comme cette entreprise de textile du Nord qui a su ne pas délocaliser, en faisant de la qualité et aussi en réduisant les coûts au sein de l'administration, pour se concentrer sur la production...Les beaux exemples existent.

Un constat s'impose aussi : la réindustrialisation coûte cher. Et depuis les années 70, le patronat a choisi de faire disparaître les industrie, en France, au profit des services. Cette stratégie est durement remise en cause depuis la crise. Le contre exemple flagrant, c'est l'Irlande...Il faut donc, dans un premier temps, sauver ce qui est encore "sauvable" et arrêter de voir partir les belles entreprises de notre territoire. L'idée d'aller faire moins cher ailleurs est un échec. Premièrement, c'est jamais assez : par exemple, le textile a d'abord délocalisé au Magreb avant d'aller encore moins cher en Asie. C'est un jeu sans fin. Ensuite, la France a un potentiel de recherche et d'investissement plus fort (pour l'instant) que les pays émergents. Il faut donc en profiter pour jouer la carte de l'innovation et de la qualité.

Les priorités, pour sauver notre industrie, selon Martial Bourquin, c'est une campagne de communication, à grande échelle, pour redorer le blason du secteur. Faire de celui-ci une cause nationale, c'est le premier pas vers une prise de conscience collective. Il faut aussi que cela passe par l'éducation nationale. Il faut que les formations soient mieux adaptées et mieux concertées entre le monde du travail et l'école. Je suis prof et je ne peux qu'approuver.

Enfin, il faut pratiquer un protectionnisme "light" qui permettra de faire valoir nos productions (protéger les brevets, exiger les mêmes conditions sociales et environnementales pour les importations ou imposer des taxes sociales ou "carbone" pour les pays importateurs qui ne respecteraient pas nos règles du jeu.

Bref, c'était une soirée passionnante. Je veux croire que ce travail fera partie intégrante du programme du PS, l'année prochaine. Et surtout que la candidate ou le candidat saura le défendre aussi bien que Martial Bourquin l'a fait hier soir.

Je voulais parler aussi d'un sujet abordé en question, mais je crois que je reviendrai dessus plus tard. La soirée a été trop riche pour ne faire qu'un seul billet...

CC
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6 commentaires:

  1. Hum, vouloir imiter l'Allemagne n'a aucun sens. Si tel était le cas, il faudrait exporter la production sur Mars. Alors que le monde est déjà en état de surproduction.

    Certes il faut tendre vers la relocalisation de l'industrie, et plus généralement de l'économie. Ce qui passe évidement par un protectionnisme (pourquoi light?), condition nécessaire à toute réforme progressiste (baisse du temps de travail, augmentation des salaires, mesures sociales...). Mais la France doit d'abord chercher à satisfaire la demande intérieure, pas d'exporter au maximum pour plomber l'économie de ses voisins. Ce n'est d'ailleurs tout bonnement pas possible, le solde des imports-exports au niveau mondial étant toujours de 0...

    Mais la réindustrialisation telle que présentée par M. Bourquin me semble n'être que de la bonne vieille relance de la croissance à Papa.

    Y'a encore du boulot, mais ce qui fait plaisir c'est de voir peu à peu progresser le thème du protectionnisme à gauche.

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  2. Intéressant de lire ton excellent billet le jour où on apprends que Peugeot compte fermer son usine d'Aulnay-sous-Bois :/

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  3. Passionnant, commentaires compris. Je me suis fait la même remarque sur le protectionnisme ("pourquoi light ?"). Avec une nuance, la défense de l'industrie à condition que ce ne soit pas nous faire avaler la défense du tout nucléaire.

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  4. "Je veux croire que ce travail fera partie intégrante du programme du PS, l'année prochaine."

    En tout cas, c'est ce que propose Arnaud Montebourg dans son livre intitulé "Votez pour la démondialisation !"

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  5. Bonjour,

    @Tassin : Vouloir faire de la qualité est louable, vouloir renforcer les liens entre les industries et les régions aussi. Je pense que se rendre compte que l'industrie qu'on nous vante et qu'on pose en exemple, en permanence, a le même coût du travail que nous, ça ne peut pas faire de mal...Bref, sans copier l'Allemagne, on peut y apprendre pas mal de choses...Pour le protectionnisme "light", je pense que l'idée, c'est qu'il ne faut pas pénaliser les grandes entreprises française qui tirent leur épingle du jeu à l'exportation. Ce serait bête...

    @El Camino : oui...Et le même jour, ou presque, on apprenait qu'à quelques kilomètres de la réunion, PSA voulait supprimer 600 emplois pour aller fabriquer ses amortisseurs ailleurs. La bataille politique a commencé...Triste monde...

    @Mitslav : pour le protectionnisme "light", je réponds à Tassin...Pour le tout nucléaire, ce n'est pas du tout le discours de Bourquin, au contraire. Il a d'ailleurs pris l'exemple des panneaux solaires, développés en France, avec des technologies très avancées, mais à qui on a coupé les vivres récemment et qui sont obligés de partir à l'étranger. Il pense qu'on est entrain de perdre cette bataille.

    @Anonyme : Tant mieux ! :)

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  6. @ Anonyme : normal que cela ressemble a du MONTEBOURG, Martial BOURQUIN en était proche jusqu'au moment où il a compris qu'il devait filer le parfait amour avec MOSCOVICI pour devenir sénateur.

    Au delà de ça, Martial BOURQUIN est un sénateur besogneux qui fait honneur à son mandat.

    Ancien ouvrier dans l'industrie, il est l'élu du Pays de Montbéliard où l'industrie reste fortement implanté.

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