15 janvier 2010

L'arnaque de la réforme de la formation des profs

On le savait bien : la réforme de l'IUFM et de la formation des enseignants, c'était pour faire des économies.

Tant bien que mal, on s'était fait à l'idée que les stagiaires, tout juste munis de leur droit à faire leurs preuves, allaient avoir désormais 12 heures de cours par semaine (contre 6-8 heures à présent) et donc, 6 heures de formation (au lieu de 12 maintenant).

On savait bien que ce serait encore plus difficile qu'avant, que sans doute, les démissions se ferait plus nombreuses, durant cette première année, avant même la titularisation définitive. 12 heures de cours, pour un prof de français au collège, c'est deux ou trois classes. Pour un prof de biologie, c'est six classes. Et pour un prof de musique, 12.

Les premières années, la somme de travail est énorme : les préparations sont un casse-tête, les corrections durent des plombes. Même avec 6 heures de cours, je me souviens que j'emmenais mon travail avec moi, à la maison, jusque au milieu de la nuit...Et la gestion de la classe est un enfer...

On s'était fait à l'idée, même si l'on ne s'en réjouissait pas, forts de constater que de toutes façons, toutes manifestations, toutes grèves se révélaient vaines, le mot d'ordre étant au "prof bashing" et à la réduction d'effectif général.

Mais nous n'avions rien compris.

Ce sera encore pire : les stagiaires donneront en fait 18 heures de cours par semaine.

Comment ? Quoi t-est-ce ? Pourquoi ce changement soudain ?

Simplement, par un petit arrangement : les stagiaires auront bien des sessions de formation, mais regroupées en une seule fois, sur quelques semaines, au mois de janvier ou février. Au final, si l'on "lisse" les heures, à l'année, cela équivaudra bien à 12 heures de cours par semaine, en moyenne...L'arnaque est là.

Les élèves verront leur professeur remplacé, peut-être plusieurs fois par an. Par qui, nous ne savons pas, puisque bien souvent le système de remplacement est saturé et qu'il faut avoir recours à des vacataires, étudiants à bac+3 qui ont encore moins de formation que les stagiaires...

Et puis surtout, les stagiaires commenceront l'année sans avoir de formation du tout. Quand on sait combien le début d'année est délicat et important pour la gestion de la classe... Cela signifie surtout qu'on suppose qu'il est possible d'être prof à temps plein sans être formé pour ça. Nous allons lentement mais sûrement vers une disparition complète de la formation professionnelle.

Ah...Mais suis-je bête, ce n'est que l'application du principe de diminution progressive de la qualité du service public prôné par l'OCDE...

Pour mémoire...

« [...] Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse. On peut réduire, par exemple, les crédits de fonctionnement aux écoles ou aux universités, mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement et l’école peut progressivement et ponctuellement obtenir une contribution des familles, ou supprimer telle activité. Cela se fait au coup par coup, dans une école mais non dans l’établissement voisin, de telle sorte que l’on évite un mécontentement général de la population. »
Centre de développement de l'OCDE, Cahier de politique économique n°13, OCDE 1996


CC
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6 commentaires:

  1. Une petite démonstration dans l'école primaire ?
    Cette année : disparition définitive des IUFM, Instituts Universitaires de Formation des Maîtres. Pour mémoire, ces IUFM avaient remplacés l'Ecole Normale il y a un bout de temps maintenant.
    Que faisait-on à l'IUFM ? Pas assez de choses au goût des profs, mais c'était déjà ça ! On était encadrés pour découvrir des classes, réfléchir sur les pratiques pédagogiques, s'essayer à notre futur métier après avoir été trié sur le volet par un concours où il y avait beaucoup d'appelés mais peu d'élus.
    face à nous, des Piufm (professeurs de l'IUFM), bien souvent des gens de terrains qui nous expliquaient ce que c'était que de se retrouver devant trente gamins 6 heures par jour avec pour objectif de tous les emmener plus haut.
    Aujourd'hui, terminé les IUFM.
    Formation universitaire pour tout le monde : un master et hop, en classe !
    Et bien j'ai peur.
    J'ai peur en tant qu'enseignante de voir débarquer des jeunots qui vont se faire bouffer tout cru, hurler dans leur classe et pleurer en salle des maîtres.
    j'ai peur en tant que parent que mes enfants croisent la route de ces enseignants.

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  2. Désolée pour les fôtes dort taux gras feu, la quiche est au four et je n'ai pas pris le temps de me relire avant de cliquer sur "envoi" ! ^^
    Mais bon, je ne suis qu'en CM1 alors... ;-)

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  3. Bonsoir Karine,
    Les fôtes, c'est sans doute à cause du niveau déplorable des profs, voyons ! (j'rigole, bien sûr!)

    Oui, j'ai les mêmes craintes que toi. Je me demande quand le système va craquer, quand il va s'effondrer sur lui-même.

    Mais je sais bien aussi que les jeunes sont si précarisés qu'ils sont prêts à accepter n'importe quelles conditions...

    Et ça me fait très peur...

    Bises,
    CC

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  4. Et moi qui suis maman ça me fait peur aussi.
    Un de mes fils a eu une débutante sortant de l'Iufm et la pauvre a eu tellement de mal avec son CE1. j'imagine sans formation du tout, comment vont ils faire ?
    On doit quand même pouvoir faire quelque chose ? Non ???

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  5. Misère, misère... Et ça fera le beurre de qui tout ça, des boîtes privées de cours particuliers (qui embaucheront peut-être des profs aguerris d'ailleurs, qui scieront ainsi leur propre branche)...
    Ils vont super vite pour bien détruire la culture et l'éducation. Le fait est qu'il y a déjà pas mal de vacataires non formés, titulaires d'une licence ou plus, qui se galèrent. Finalement, ils font le taf, ferment leur bec (parce que précaires) et coûtent moins cher que des titulaires. Pourquoi donc se priver de transformer à terme tous les postes en postes précaires?...

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  6. Bonjour,
    @MHF : les parents devraient avoir leur mot à dire...Qu'en pensent les fédérations de parents ? Je ne sais pas, mais ils seraient bon de se manifester auprès d'elles...Faites passer le message...

    @Grimmy : la précarisation, c'est à mon avis un des buts non avoués. Le précaire est maniable et corvéable à merci...

    Triste éducation nationale...

    CC

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