15 décembre 2011

Grève dans l'Education Nationale

Ce matin, j'ai été réveillée par le journal matinal de France Inter. Il paraît que les profs sont (encore) en grève. Je sais.

Il paraît qu'ils sont très peu en grève, selon ce journal matinal. Selon le ministère, 8%. Dans le premier degré. Mouarf. Chiffres bidons qui n'ont aucun intérêt.

En fait, le motif de la grève, c'est le changement de l'évaluation des professeurs. Jusque là, les chefs d'établissement notent les profs à hauteur de 40% pour ce qui concerne la vie de l'établissement, le rayonnement au sein de cet établissement et l'assiduité et la ponctualité. Bref, les choses qui sont du ressort du chef de l'établissement : il a légitimité pour cela. Même si les notes qu'il peut mettre ont peu de poids, j'en conviens. C'est là qu'il aurait fallu intervenir, sans doute.

Pour les 60% restant, ce sont les inspecteurs qui nous notent. Il y en a pour toutes les matières. Ce sont des spécialistes de leur discipline. Ils nous notent sur l'enseignement, sur le travail avec les élèves. Ils viennent nous voir une fois de temps en temps en classe, ils regardent notre progression, les cours qu'on fait, le cahier de texte de la classe, les classeurs des élèves. Ils connaissent le programme, les exigences de la matière. Ils nous donnent des conseils, nous aident pour mieux comprendre l'esprit et la lettre des programmes. Leur note, au final, a peu de poids et ils passent trop peu auprès des profs. C'est là qu'il aurait fallu intervenir, sans doute.

Au lieu de ça, on tente de nous imposer une note unique : celle du chef d'établissement. Soyons honnête : un principal de collège ou un proviseur de lycée ne peut pas connaître les programmes de chaque matière. 

(C'est pour cela que les chiffres du ministère sont bidons : dans le premier degré, c'est différent, puisque les directeurs d'école sont aussi professeur des écoles, en règle générale)

Si l'on tire les conclusions de cette réforme que Chatel veut à tout prix imposer avant 2012, on constate trois choses :
- Visiblement, le programme, le contenu, l'idée de faire progresser les élèves, de leur apprendre des choses semble n'avoir aucune importance.
- On cherche à faire des économies énormes : en effet, supprimer le corps des inspecteurs académiques, cela va faire de la place. Les inspecteurs sont en général d'anciens professeurs. On imagine donc qu'il leur sera demandé de regagner les classes. Cela devrait leur plaire...
- Enfin, on continue sur cette lancée de l'école "entreprise". Cela fait déjà des années que l'on parle avec des mots qui n'ont rien à voir avec l'école, dans les CA, les conseils, les CESC et tout le bataclan : "bénéfices", "performances", "rationalisation", "économie", "retour sur investissement"...Là, le chef va devenir PDG et DRH en même temps. Cool.

Enfin, cela participe à la casse de l'éducation nationale, du nivellement vers le bas permanent qui s'opère déjà par la multiplication des tâches parallèles imposées (code de la route, premier secours, TICE...) et par le livret de compétences...

Point n°7 de cette belle infographie à faire tourner...

CC
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4 commentaires:

  1. C'est ici l'argumentaire SNES qui nous est servi. Normal puisque ce syndicat, plutôt que de défendre la vie rélle des enseignants en ne se battant quasiment jamais, par exemple, sur leurs salaires, préfère l'intérêt des "syndicats". Et il n'est donc pas admissible qu'on mette en péril la corporation des inspecteurs!
    Or ceux-ci, et beaucoup d'enseignants s'en plaignent, plutôt que d'être dans le "réel" de la pédagogie se comportent davantage en "commissaires politiques".Les meilleurs enseignants sont souvent les moins bien notés et vous le savez. Pauvres enseignants qui encore une fois se mobilisent pour la seule défense de ceux qui les méprisent!
    Cofier la tâche de l'évaluation aux chefs d'établissement n'est certes pas une bonne idée: J'ai toujours pensé que les inspecteurs devraient être des enseignants à mi-temps, inspectant dans le niveau et le public qui est le leur dans leurs classes.C'est ce type de débat qu'il faudrait ouvrir.

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  2. Un peu contradictoire, ce commentaire, Nouvel Hermes : d'un côté, le SNES ne se bat pas pour les bonnes choses et de l'autre, l'évaluation par les chefs d'établissement n'est pas une bonne idée ?

    Les inspecteurs que j'ai eu l'heur de croiser dans ma carrière étaient parfois bons et m'ont donné de bons conseils (2/3), parfois à quelques semaines de la retraite et complétement dépassé (1/3). Il n'empêche qu'ils connaissent la discipline, les programmes et les élèves (2/3, au moins, pour mon expérience). Je n'ai pas senti de mépris de leur part (3/3, cette fois).

    Par contre, dans ton commentaire, je sens le mépris...

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  3. Je n'ai aucun mépris pour les personnes mais pour la fonction. C'est pour cela que je propose une autre forme d'inspection faite par des gens de terrain. Qu'un même inspecteur de lettres puisse inspecter un prf à Henri IV et un autre en banlieue est une absurdité. Et tu sais bien qu'il ya des profs qui brillent plus dans les inspections que dans leur réalité quotidienne. C'est ça que je dénonce. Pas les inspecteurs qui font le boulot qu'on leur demande. Pas le temps de développer ça ici mais je connais bien les systèmes étrangers. En Allemagne dans un établissement scolaire quelqu'il soit, il n'y a que le concierge qui ne soit pas enseignant! Et dans beaucoup de pays il est surrréaliste de penser qu'en France quelqu'un qui n'enseigne plus depuis des décenies puisse enseigner. Ouvrir un débat ce n'est pas mépriser.

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  4. Selon moi, les inspecteurs sont des gens de terrain. Ils vont de classe en classe, ils voient beaucoup de situations différentes et s'ils sont normalement intelligents (et je ne conteste pas le fait qu'il y ait des cons) ils sont capables de faire la différence entre Henri IV et un collège ECLAIR. Ils ont en fait une expérience plus grande qu'un collègue qui n'a que sa propre expérience.

    Les profs qui brillent plus pendant l'inspection que le reste du temps, je n'y crois pas : si un prof n'assure pas en général, les élèves lui font payer le jour de l'inspection. Et encore une fois, un inspecteur normalement intelligent voit bien si les élèves et le prof jouent la comédie. De toute façon (et c'est peut-être là le cœur du problème), une inspection, bonne ou mauvaise ne sert à rien.

    Mais faire des chefs d'établissement, des chefs d'entreprise, ce n'est sûrement pas une solution. L'école n'est pas une entreprise, les idées de compétitivité, de visibilité, d'attraction, de piquer des parts de marché au collège d'à côté, ça n'a rien à voir avec l'école telle que je l'espère pour mes élèves...

    Évaluer un professeur, de toute façon, ça ne peut se faire qu'à long terme. Très long terme. Par exemple, si les élèves que j'ai eu en 6ème il y a 7 ans ont leur bac, ce sera peut-être un peu grâce à moi. Ce serait bien de pouvoir mesurer ça.

    C'est possible, vous pensez ? On pourrait aussi se donner rendez-vous dans 10 ans, voir ce que mes petits 6ème ont retenu, ce qu'ils ont appris avec moi, s'ils repensent parfois aux trucs que je leur donnais pour faire moins de fautes d'orthographe, s'ils se souviennent de l'émotion qu'ils ont ressenti en lisant le Petit Prince ou s'ils repensent parfois aux morales des Fables de La Fontaine...

    Le métier de professeur ne s'évalue pas à court terme.

    :)

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